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1 – Si les Mohajirines et les Ansars sont les gens à qui revient la décision dans la communauté islamique, si Dieu agrée la personne sur qui porte leur choix, ne peut-on pas s'appuyer sur cette base pour reconnaitre la légitimité des trois premiers califes?
2 – S'agit-il de tous les Mohajirines et Ansars ou ce consensus n'a aucune valeur si une seule personne s'y oppose?
3 – Cette phrase commençant par : " si quelqu'un s'oppose à la décision du consensus…" n'accorde-t-elle pas aussi une légitimité aux trois premiers califes?
Au-delà de la discussion sur la chaine de transmission de l'authenticité de ce hadith, nous devons l'analyser à partir de son contenu et du message qu'il porte. Pour cela, on doit prendre en considération certains points:
1- Explication et interprétation des parties de ce hadith.
Ce hadith comporte plusieurs parties différentes. Les premières déclarations de la lettre ("comme ces phrases par exemple, " ce peuple qui a donné l'allégeance à Aboubakr, Oumar et Ousmane vient d'en faire autant pour moi dans les mêmes conditions et pour les mêmes causes. Aucune contestation n'était acceptable ni pour ceux qui avaient pris part, ni pour ceux qui étaient absents") révèle un débat engagé entre Mouawiyya et l'imam Ali (as). L'imam est en train de le charger dans cette lettre. Car depuis l'usurpation du droit du prince des croyants au califat, presque près de 25 ans sont déjà passés. La conception erronée du choix du calife règne encore dans l'esprit des musulmans, plus particulièrement en Syrie où les nouveaux venus en islam sont entièrement sous l'influence de la propagande de Mouawiyya. Dans une telle situation où les partisans de Mouawiyya considèrent absolu et fondé le califat des trois premiers califes soit disant parce qu'ils ont été choisis par les musulmans représentés par le conseil, un fondement sur lequel était bâtie la légitimité d'un guide, il est donc évident qu'une approche raisonnée pour leur prouver qu'ils avaient tort était inutile. On remarque surtout apparemment dans ce hadith que l'imam Ali (as) veut obliger Mouawiyya à respecter son serment d'allégeance. L'imam est donc obligé de s'appuyer sur la conception de Mouawiyya et mener les discussions avec lui sur cette base. La ligne d'approche de l'imam dans cette lettre est fonction de la conception de Mouawiyya et ses partisans. [1]
Cette autre partie de la lettre: " la délibération est aussi bien l'affaire des Mohajirines que des Ansars. S'ils s'accordent sur le choix d'un homme, ce choix recevra la bénédiction de Dieu et si quelqu'un venait à protester ce choix et par hérésie rompre avec la volonté de la nation on tachera de le persuader et de le ramener dans les rangs afin de le concilier avec ce choix. Et s'il persiste toujours, il sera combattu car s'étant écarté de la volonté des croyants il devra endosser les conséquences de son comportement" révèle que les imams infaillibles (as) font aussi partie des Mohajirines et des Ansars. Et si ces imams s'accorent sur quelqu'un, c'est bien la preuve que ce choix est validé auprès de Dieu. Or nous savons parfaitement que c'est uniquement sur le choix de l'imam Ali (as) que tous les Mohajirines et les Ansars (y compris les imams infaillibles) ont été unanimes. Donc l'imam s'est réservé dans cette lettre où il mène le débat conformément aux conceptions des opposants, de manière à leur ôter toute possibilité de contestation et les contraindre à accepter la vérité. Mais comme nous l'avons déjà expliqué, si on observe bien le discours de l'imam, on va facilement réaliser que le raisonnement dans sa lettre n'est pas du tout discordante avec les croyances islamiques. [2]
2 – Comparaison contenu formel de ce hadith avec d'autre versets coraniques et hadiths.
Celui qui refuserait d'admettre ce raisonnement et s'emploie à prendre le discours dans la forme pour valider la légitimité des trois premiers califes doit savoir que quelle que soit la pertinence de la chaine de transmission d'un hadith, il ne vaut rien s'il contredit un verset coranique. Par conséquent, on ne peut s'y appuyer pour justifier quoi que ce soit. Et quand on regarde ce hadith dans la forme, on constate parfaitement qu'il contredit plusieurs versets coraniques et hadiths qui soutiennent que le califat et la succession sont des prérogatives divines revenant à l'imam Ali (as) et la lignée de sa descendance proclamée par le prophète (ç). [3]
3 – En plus de cela, il est très important de rappeler ce point. De la même manière que certains versets servent d'explication à d'autres, certaines déclarations de l'imam Ali (as) sont interprétées avec l'appui d'autres. Ces propos sont complémentaires. Par ailleurs, quand on va plus loin dans Nahjul Balagha, en particulier dans le discours Shakshakiyya, nous voyons que l'imam insiste beaucoup sur sa légitimité personnelle à la tête de la communauté islamique. [4] Il déclare dans un autre passage : " Je jure par Dieu, après la mort du prophète (ç) jusqu'à nos jours, mon droit a permanemment été usurpé et on a fait passer les autres avant moi" [5] O comprend donc très bien le message que l'imam veut faire passer à travers cette lettre à Mouawiyya.
[1] - Extrait de Shebre Sayyed Abdoullah, Nokhbatou Sharhine, page, 1417; Anehza, 1425 hégire lunaire. Minhâju bara'a fi sharh Nahjul balagha de Khoei Habibollah, vol 17, p 203, librairie islamique, 1364 hégire solaire
[2] - Tawzihul Nahjul balagha de Sayyed Mohamadi Shirazi, vol 2 et 3, p 436, Moassa fikr islami
[3] - Consultez la question 12906du site 12687
[4] - Nahjul balagha, 3ème discours
[5] - Nahjul balagha, 6ème discours